Coronavirus: le quotidien des étudiants africains coincés en Chine
En Chine, les témoignages d'étudiants africains coincés dans la ville de Wuhan se multiplient, sur les réseaux sociaux notamment. Tous parlent d'une ville morte et d'une longue attente et appellent leurs pays à organiser leur rapatriement.
Alors que plusieurs vols ont commencé à rapatrier les ressortissants de pays étrangers ces derniers jours, des étudiants kényans, somaliens et sénégalais ont appelé les autorités de leurs pays à accélérer leur évacuation.
Soliana Aregawi, elle, est éthiopienne. Étudiante en langue chinoise dans une université de Wuhan, elle raconte que cela fait désormais 12 jours qu’elle vit en quarantaine. « On ne sort pas de chez nous et de toute façon il n'y a rien à faire. Les consignes sont de ne pas sortir si on a des provisions, sauf en cas d'extrême nécessité ».
« On s'ennuie un peu à rester à l'intérieur pendant si longtemps, surtout pour moi qui adore être dehors ! explique-t-elle en riant. Mais c'est pour la bonne cause, je suppose. Heureusement j'ai des livres avec moi que je voulais lire depuis longtemps. Je reste en contact avec ma famille et mes amis. C'est pas idéal comme situation, mais ce n'est pas si terrible... »
Avec humour, l'étudiante raconte aussi un quotidien rythmé par les appels des proches. « Ma mère et mon père m'appellent tous les jours, ce qui est parfois un peu agaçant, parce qu'ils posent toutes sortes de questions : Quoi de neuf ? Qu'est-ce qui se passe ? Et moi, je leur réponds toujours la même chose : rien, il n'y a rien de neuf, je fais la même chose tous les jours. Mais je m'efforce de les rassurer et de leur donner les dernières nouvelles que j'apprends, et je leur dis que tout va bien... parce que c'est vrai, je vais bien. »
L'appel des étudiants sénégalais
Comme de nombreux étudiants africains en Chine, les étudiants sénégalais attendent de trouver une issue... Treize d'entre eux sont coincés dans la ville de Wuhan, où ils sont confinés en raison de l'épidémie de coronavirus. D'autres sont soumis à des restrictions également à Pékin et dans d'autres villes universitaires.
Bécaye Cissokho Ndiaye, le président de l'Association des étudiants sénégalais en Chine, fait le point sur leur situation à Pékin, où il se trouve. « Les gens sont relativement calmes. C’est vrai que nous sommes aussi soumis presque aux mêmes restrictions. Dans les universités, il y a des heures où l'on a le droit de sortir et on nous donne des passes. Ils prennent notre température chaque jour et nos déplacements sont limités. Nous prenons des précautions. Mais ça va, relativement. Les rues sont désertes, mais il y a quand même quelques personnes qui les empruntent. À notre niveau, à Pékin, nous sommes assez sereins. »
Il est bien davantage préoccupé par la situation de ses compatriotes à Wuhan. « C’est eux qui sont les plus menacés. Nous avons un représentant là-bas avec qui nous discutons très souvent. » L’association a d’ailleurs publié dimanche un communiqué où elle s’inquiète des « conditions très difficiles » dans lesquels vivent leurs compatriotes à Wuhan. Elle appelle les autorités sénégalaises à leur « rapatriement immédiat ».
Mais en marge de la traditionnelle cérémonie « de levée de couleurs » au palais présidentiel ce lundi, Macky Sall a indiqué à la télévision nationale que leur rapatriement n’était pas à l’ordre du jour.
« Nous sommes en contact avec eux par le canal du ministère des Affaires étrangères et de notre ambassade à Beijing. Nous avons pu envoyer des appuis, mais la question du rapatriement a été posée. Elle n’est pas simple. Cela requiert une logistique tout à fait hors de portée du Sénégal, puisqu’il faut des avions spéciaux qui puissent aller sur place, il faut du personnel militaire… Il faut énormément de conditions. Et lorsque ces personnes reviennent, il faut pouvoir les mettre en quarantaine dans un lieu équipé en conséquence. Ce qui n’est pas le cas pour le moment de notre pays. Mais pour autant nous ne pouvons pas délaisser nos compatriotes. »
Le président a également annoncé l’annulation de son voyage prévu cette semaine en Corée, « en solidarité », expliquant qu’il ne pouvait pas « survoler nos compatriotes en Chine dans ces circonstances ».
Retour au pays d'Algériens, Tunisiens, Libyens et Mauritaniens
Des étudiants algériens, eux, sont rentrés dans leur pays. L’avion de la compagnie Air Algérie a atterri ce lundi. Selon les autorités, à bord 36 Algériens, mais aussi 10 Tunisiens, et des étudiants libyens et mauritaniens. Ils seront confinés dans un hôpital d’Alger pendant 14 jours.
Une piste d’atterrissage à l’écart, des forces de sécurité avec des masques et des minibus attendaient les personnes rapatriées de Chine. A l’intérieur de l’avion affrété spécialement par les autorités algériennes, une équipe médicale avait déjà accompagné les passagers : 31 Algériens, 10 Tunisiens, 3 Libyens et 4 Mauritaniens qui résidaient dans la région de Wuhan.
Les passagers tunisiens ont pris un autre avion militaire vers Tunis. Les autres ont été emmenés dans un hôtel à la périphérie d’Alger où ils resteront confinés pendant 14 jours. Dans la soirée, le ministère de la Santé a affirmé qu’aucun test pratiqué sur les personnes rapatriées ne révélait pas pour le moment la présence du coronavirus.
Une cellule de veille a été mise en place par les autorités, et un dispositif de contrôle de température est installé à l’aéroport d’Alger pour les vols en provenance des villes où les voyageurs effectuent des correspondances depuis la Chine.
RFI