Angéline Ndayishimiye : l’ombre influente du pouvoir burundais
Angéline Ndayishimiye, Première Dame du Burundi depuis 2020, est loin d’être une simple figure protocolaire. Officiellement engagée pour les plus vulnérables à travers sa fondation Bonne Action Umugiraneza, elle est aussi au cœur de plusieurs controverses mêlant affaires, pouvoir et luxe dans un pays où plus de 70 % de la population vit dans la pauvreté.
Une fondation bien dotée, mais opaque
La fondation Umugiraneza, omniprésente dans les médias et les événements officiels, mène des actions sociales dans les écoles et hôpitaux. Mais derrière cette image, des ONG locales et des analystes dénoncent un manque total de transparence : aucun audit public n’a jamais été publié.
Plus troublant, le budget national 2024–2025 prévoit une allocation directe de 6,5 milliards de francs burundais (environ 2 millions d’euros) à la fondation — une somme colossale dans un pays dont le PIB par habitant ne dépasse pas 300 USD par an. Ces fonds échappent aux contrôles du Parlement et sont gérés comme des dons présidentiels.
"Prestige" : les affaires privées sous la bannière publique
La société Prestige Investment Group, liée à l’entourage de la Première Dame, opère dans les domaines de l’importation, des uniformes scolaires et des produits de luxe. Elle aurait reçu plusieurs marchés publics sans appels d’offres transparents, notamment pour des fournitures scolaires distribuées sous le label de la fondation.
Selon des sources internes, Prestige aurait réalisé plus de 4 milliards BIF de chiffre d’affaires entre 2022 et 2024, en grande partie grâce à des programmes sociaux financés par l’État. Des accusations de conflits d’intérêts sont récurrentes, mais ignorées par les autorités.
« On a transformé l’humanitaire en business d’État », confie un ancien fonctionnaire du ministère des Finances.
Un luxe qui scandalise
Angéline Ndayishimiye est aussi connue pour son style vestimentaire ostentatoire. Lors de cérémonies officielles, elle apparaît vêtue de tenues estimées à plusieurs milliers de dollars — sacs Chanel, escarpins Louboutin, robes sur mesure.
En 2024, une photo d’elle portant un sac de luxe estimé à 3 800 USD a suscité une tempête sur les réseaux sociaux. Dans un pays où une institutrice gagne à peine 50 USD par mois, le contraste est choquant.
« Ce n’est plus de l’élégance, c’est de la provocation », commente une étudiante de l’Université du Burundi.
Influence silencieuse, pouvoir réel
Au sein du régime Ndayishimiye, plusieurs observateurs parlent d’un pouvoir parallèle exercé par la Première Dame. Selon des sources politiques, elle jouerait un rôle clé dans des nominations administratives, des orientations économiques et même certaines décisions stratégiques.
Des initiatives gouvernementales sont souvent annoncées via la fondation avant même d’être débattues publiquement. Une centralisation du pouvoir qui inquiète les milieux diplomatiques et les organisations de la société civile.
Conclusion : entre philanthropie et empire personnel
À travers sa fondation, son entreprise et son image médiatique, Angéline Ndayishimiye construit un pouvoir qui échappe à tout contrôle démocratique. Dans un pays confronté à la crise économique, à la dépendance humanitaire et à un appareil d’État affaibli, la figure de la Première Dame illustre la dérive d’un pouvoir personnalisé et verrouillé.